Prendre l’air (épisode 0), le pilote
Pas facile de reprendre l’écriture de ce blog lorsque l’on a accumulé trop de jours à se dire qu’il faudrait vraiment faire quelques mises à jour, mais voilà le temps n’est pas un allié solide lorsque l’on travaille il a l’air de filer à l’anglaise plus vite encore. Alors revenir oui mais pour raconter quoi? Autant le dire je n’ai pas été déçu des mise à jour de chez Red, de la nouvelle Amira mais plus que tout c’est vers le tournage aérien que va se tourner ce billet (et peut être les suivants) dans la mesure où cela nécessite beaucoup de patience et de technique mais une fois maitrisée le pilotage d’un engin puissant et bien équipé (retour vidéo, tête vidéo stabilisée, caméra 4K) cela devient un plaisir d’aller tourner de belles images au dessus des clochers et des mosquées, sur l’eau ou dans les montagnes les plus reculées.
Alors bien sur ça n’est jamais facile d’obtenir les autorisations pour tourner au Liban notamment mais honnêtement je jeu en vaut la chandelle car en quelques mois j’ai eu le plaisir de voir le pays sous un angle neuf et de le redécouvrir depuis le ciel, tout en gardant les pieds au sol, une variante un peu moins chère et moins polluante de la terre vue du ciel d’une photographe célèbre.
Ce fut Baalbeck, Beyrouth, Le Mont Liban, le Chouf, et comme de nombreux projets arrivent y compris plus à l’est dans le Moyen Orient je vous raconterai sous un angle un peu technique ces quelques aventures où l’on part avec sa caméra et sans trépieds. D’autant plus que filmer en 4k peut sembler parfois compliqué mais quand on rajoute à cela un pilotage de la caméra par deux télécommandes cela mérite quelques anecdotes et de bien connaitre son matériel. Pour ma part comme vous pouvez le voir j’ai opté pour un Spreading Wings DJI S1000, ce qui se fait de mieux à mon sens pour y loger un 5D, un Lumix GH4 ou une Scarlet.
Comme je compte bien ne pas m’arrêter en si bon chemin je vais chercher des productions pus au nord et plus à l’est donc si vous êtes intéressé par ce type de tournage quelque soit la destination contactez moi, ce sera avec plaisir. Et je ne doute pas que ce récit à venir va être utile à de nombreux chef op qui n’ont pas encore tenté l’expérience, car cela nécessite tout de même un brevet de pilote et quelques connaissances.
Making of « La société Hezbollah » : Webdocumentaire
Ce blog que j’ai lancé fin 2011 pour suivre l’actualité des technologies du cinéma numérique en me basant sur l’expérimentation sur le terrain, mais aussi quelques billets sur l’industrie et l’histoire du cinéma au Moyen Orient va se transformer pour quelques temps en un « making of » d’un webdocumentaire sur lequel je travaille désormais. Même si le travail effectif n’est pas encore lancé officiellement du fait des vacances et que rien ne sera signé avec les productions et les diffuseurs avant la rentrée je vais désormais rendre compte ici de l’avancée de cette plongée au coeur de « la société hezbollah« .
Le sujet, le traitement et la production de cet objet documentaire, réalisé à base de photographies, de vidéo, d’archives et d’iconographies ainsi que de son et de musique mérite à mon sens que l’on se penche aussi sur les différentes étapes qui vont jalonner le long parcours qui débute aujourd’hui.
Tout d’abord quelques mots sur le fond du documentaire. Il s’agira de plonger au coeur de la société (militants, habitants, cadres, institutions) du hezbollah libanais, à travers quatre de ses « territoires » (le sud liban, la vallée de la Békaa, la banlieue sud de Beyrouth et un quartier de la capitale). Nous passerons en revue tous les aspects de l’action du parti de Dieu depuis sa création, aussi bien sur le plan militaire, religieux, politique, social, économique et culturel. tout cela à travers trois chapitres (l’exercice du pouvoir, la structure et les fondements du parti et enfin l’action militante).
Je rentrerai dans les détails techniques et autres au fur et à mesure du tournage et de l’avancée du projet. J’ai obtenu l’autorisation du Hezbollah après une longue attente et une présentation du projet auprès de leurs institutions dédiées à la presse et à l’information. Et pour les plus septiques d’entre vous je dispose d’une assez grande liberté d’action pour pouvoir travailler au sein de leurs institutions pendant plusieurs mois afin de réaliser un webdocumentaire dense et le plus complet possible traitant de nombreux aspects et questions que suscitent le parti. Comme un signe (positif je l’espère mais j’en doute vue les circonstances et les enjeux) depuis que l’accord à mon égard est intervenu, la branche militaire du parti est désormais « blacklistée » par l’Union Européenne.
Je tournerai avec une Red la partie vidéo (essentiellement des entretiens) ainsi qu’avec un Canon (1DC?) pour les prises de vues photographiques (noir et blanc) et tout cela me donnera l’occasion d’aborder tous les aspects de cette réalisation pas comme les autres de la production à la programmation de ce webdoc en passant par le tournage, les workflows et sa diffusion (prévue en 2014).
A bientôt sur le terrain, vous pourrez suivre aussi l’évolution de cette production sur Twitter @webdochezbollah
Le Moyent Orient vu d’Hollywood, une mise au point nécessaire.
Une fois n’est pas coutume je laisse la technique des oeuvres que je vais aborder ici pour m’arrêter à l’image au sens de la représentation qu’elle donne du Moyen Orient.
Si vous avez vu Argo, de Ben Affleck, récemment et que cela vous a donné envie de découvrir l’Iran tant mieux, mais vous risquez d’être un peu surpris en arrivant à Téhéran, pas seulement parce que l’action se passe il y a une trentaine d’années, mais surtout parce que pas une seule image ne provient de de la capitale iranienne alors que la majorité du film s’y passe théoriquement.
En effet c’est la Turquie qui fut choisie majoritairement pour ressembler à l’Iran, pour y reconstituer ses rues et ses ambiances, mais également l’aéroport d’Ontario ou le parc Hancock et l’hôpital « Veteran Affairs » de Los Angeles qui vont servir de décor à Argo pour y tourner les scènes dans l’aéroport ou aux abords de l’ambassade US. Pour le reste, tous les arrières plans du film sont en fait des créations numériques que l’on doit à un bataillon d’entreprises spécialisées dont : Shade VFX, Christov Effects and Design, Pixel Playground, Furious FX et Method Los Angeles et Vancouver. Toutes se sont inspirées de ce qu’elles savaient ou pouvaient voir de Téhéran, et Google Earth fut donc mis à contribution au même titre que des archives photographiques datant des années 70. Sur ce plan, trouver des images d’époque et finalement plus facile que des vues contemporaines.
La photographie générale du film contribue parfaitement à rendre crédible ce récit censé se dérouler dans le passé mais l’écueil reste comme dans Syriana il y a quelques années ou Spy Game, que l’ambiance du Moyen Orient est surtout basée sur des « clichés » que l’on doit à des analystes (militaires pour la plupart) n’ayant jamais quittés leurs bunker » diplomatiques à Beyrouth notament. Argo n’évite pas cet écueil mais l’atténue (sauf si l’on regarde le film du point de vue iranien ou moins nord américain bien sur mais c’est un autre débat) en basant son histoire il y a quelques 33 ans.
On ne peut pas en dire autant de Homeland dont la saison deux (une saison trois est déjà au programme) se passe pour quelques épisodes au Liban en 2012. Loin de moi l’idée de vouloir que l’on tourne toujours dans les décors réels, même si je l’avoue, j’aime surtout tourner des documentaires, mais vouloir faire ressembler Beyrouth à ce que l’on voit dans la série, adaptée de « Prisonnier of war« , en dit beaucoup sur la vision nord-américaine de la région. Vous n’avez jamais mis les pieds au Liban, Claires Danes non plus; qui joue pourtant très bien l’ex agent de la CIA qui doit y rencontrer une femme d’un dirigeant de Hezbollah prête à trahir son camp et son mari. En effet si Argo à choisi la Turquie et les effets spéciaux, Homeland a porté son choix sur le Maroc et les décors naturels de Casablanca semble t-il, et cela ne fonctionne pas du tout. Une simple recherche sur Google images aurait permis aux auteurs de voir un autre Liban, moins caricatural.
Ils auraient pu choisir le Mexique, moins loin de Hollywood car étant donné la vision approximative qu’ils ont du Liban, à savoir une sorte de pays plus proche de l’Afghanistan, où Haifa Wehbe n’existerait visiblement pas ils auraient fait des économies. Claire Danes doit se teindre en brune, porter des lentilles marrons et se voiler pour que, la blonde qu’elle est, puisse naviguer au sein d’une peuplade portant keffieh et barbe. D’ailleurs dès l’aéroport, où un portrait de Saad Hariri nous fait penser qu’il serait donc premier ministre, on comprend que l’on va devoir en avaler beaucoup sans rire.
L’apothéose étant que le Hezbollah et al qaida seraient en fait la même chose, et que, au passage, la rue Hamra, qu il n’est pas dur pourtant de visiter, d’y obtenir une autorisation de tournage voir des photographies contemporaines, n’est pas un quartier où des jeeps équipées de mitrailleuses lourdes viennent sécuriser des réunions salafisto-hezbollah. Ah! dans ce monde où Haifa Wehbe n’existerait pas, les USA mélangent à peu près tout (l’Afghanistan, l’Iran, Beyrouth en 1982) et se bloquent sur une vision des années 70/80 ce qui colle parfaitement à une reconstitution historique dans Argo (d’un point de vue occidental) mais pas à une fiction des temps moderne.
La faute peut être à ce renfermement et cet ethnocentrisme y compris à ceux qui ont l’air d’être les plus ouverts sur le continent américain. Ainsi Clooney ou Affleck ne paraissent pas connus pour être des faucons ignorants, mais tout de même, à l’image de Keanu Reeves (pourtant né au Liban) qui lorsqu’il fait un documentaire (Side by Side) au demeurant très intéressant sur le cinéma numérique oublie juste de jeter un oeil en Europe, en Asie et finalement ailleurs qu’à Hollywood ou New York.
Retour à la réalité.
De mon coté j’étais en tournage à Chypre, coté grec puis à Istambul pour une série de programmes courts partant à la découverte des villes d’Europe et d’Occident pour une télévision du Qatar. Nous tournons les premiers épisodes avec une Sony EXcam EX3 malgré son codec interne LongGop à 35 Mb/s et une 5D (et son horrible H264) vient faire office de caméra B pour les interviews.
En revenant sur des tournages avec des caméras de type ExCam on se souvient comme il est appréciable d’avoir un outil assez ergonomique, peu couteux, stable et doté d’un workflow des plus simples. Après de nombreuses galères ou malentendus avec notamment des RED qui malgré leurs grandes qualités peuvent parfois causer des angoisses voire poser des problèmes, de son, d’allumage, de workflow ou d’autonomie.
Pourtant mon choix pour l’année à venir est bien d’essayer de ne travailler qu’avec une RED, en l’espèce la Scarlet et de pouvoir ainsi délivrer des films allant du format 4K au HD. En effet je vous ai déjà conté les mérites du petit enregistreur externe pix 240 de sound device et c’est bien grâce à lui que ce choix est possible.
Capable d’enregistrer en 10 bits, 4:2:2 et en AppleProRes comme en DnxHD (pour les monteurs en Avid) jusqu’à 220mb/s dans les deux codes, sur des SSD de 2,5 pouces (dont le prix baisse de plus en plus et dont la qualité est très bonne y compris dans des tournages compliqués en présence de poussières, d’embruns, de neige…) mais aussi sur des cartes CF. On alimente ce petit bloc très compact et solide par la caméra elle même ou via des batteries Sony L, on pourra alors se plaindre d’une autonomie un peu courte car il faut toujours qu’on se plaigne. Pour le reste, à part l’écran qui ne restitue pas vraiment la colorimétrie des images que l’on tourne, un défaut de balance des blancs récurrents sur tous les modèles que j’ai utilisé. Mais comme l’on dispose d’entrées mais aussi de sortie en HD-SDI et HDMI on branchera un moniteur de contrôle. Mon small HD faisant alors parfaitement l’affaire. Du coté du son, on peut faire confiance au pré-ampli de sound device pour s’occuper parfaitement des canaux audio notamment à travers les entrés XLR que l’on peut configurer et monitorer comme on le souhaite. Les différents upgrades de l’engin nous permettent désormais de ne plus avoir à appuyer sur la touche enregistrer de l’appareil et c’est bien pratique. Je m’en explique, une fois relié à la caméra c’est le bouton de cette dernière qui pilote l’enregistrement sur le pix 240 évitant d’avoir à déclencher deux fois mais surtout d’interrompre par inadvertance par pression des grosses touches du boitier externe.
C’est donc un boitier qui a su me conquérir car il me donne une certaine sérénité dans le travail, quelque soit la caméra que j’utilise, le codec est toujours le même et le haut débit d’écriture donne un peu plus de qualité à mes images y compris en provenance de caméra 1/3 de pouce ou d’un demi pouce.
Pour exemple sur ce type de tournage pour le Qatar à travers le monde (il est prévu de faire escale à Paris, Londres, Prague, Berlin, Amsterdam, Barcelone et New York City dans un premier temps) il me permet de proposer un meilleur codec à la production qui tient à tourner la chose en ExCam (ils disposent déjà d’un parc de caméras de ce type) et de disposer l’air de rien de 2 canaux audio supplémentaires, et d’une copie de sauvegarde sur cartes SxS en plus de la duplication des rushes sur deux disques durs chaque soir. Je voyage l’esprit tranquille, le workflow est des plus simple, l’ergonomie est bonne et le tout étant solide et compact l’appareil se loge dans un sac à dos dans une petite housse et depuis le temps n’a pas pris un coup.
Les SSD sont un bonheur en terme de rapidité et de fiabilité (j’utilise des SSD Samsung 830 et des OCZ Vertex 3). Les monteurs sont ravis de posséder les images en AppleProRes ou en DnxHD selon leurs demandes, et enfin je peux proposer à mon tour des tournages avec la Scarlet voir l’Ikonoscop sans être tenu à un workflow plus long et couteux en temps et en matériel. C’est donc un achat certes un peu couteux (on le trouve en France à 3500 euros mais son prix devrait baisser) mais qui permet aussi de rentabiliser une caméra comme la RED en permettant de l’utiliser lors de tous les tournages ou presque ce qui n’est pas rien lorsque l’on voit le cout d’un tel achat. Voilà comment je vais donc proposer à la production de tourner la saison 2 de ces programmes courts en Scarlet et de leur délivrer les rushes en HD 10 bits à 220mb/s afin que cela ne nuise pas en temps et en argent à la post production.
Par ailleurs le 4K semble devoir devenir la prochaine norme de diffusion du moins si l’on écoute les différents bruits venant de chez Sony qui annonce ni plus ni moins vouloir devenir leader sur le marché du 4K tant en captation qu’en diffusion en étant capable de fournir des caméras et des HDSLR dotés de tels capteurs et de processeurs capables de traiter un tel flux et de la diffuser sur un projecteur vidéo de salon en l’occurrence le modèle VPL-VW1000ES dont on en connait pas encore le prix qui sera aussi capable de convertir des sources en 2K ou en simple HD. La NHK elle, vient de révéler qu’elle travaillait sur un capteur de 8K, le futur semble s’inscrire dans une course à l’armement technologique que les japonais n’ont aucune intention de laisser aux USA ou aux européens. Enfin si ces normes n’atterriront pas dans nos salons avant 2016 sachez que les codecs vidéos permettant de tels encodages sont déjà à l’étude en vu de remplacer notamment le H264, ainsi le H265 (en fait le High Efficiency Video Coding HEVC) sera capable de réduire la taille des fichiers de 40% à qualité égale mais surotut prendra en charge des formats jusqu’à 7680X4320 pixels. C’est en effet le format (Ultra High Definition Television UHDT) 4320p ou 8K qui semble avoir était retenu. On en saura plus dans un an lorsqu’en janvier 2013 lorsque l’Internation Telecommunication Union et MPEG-LA dévoileront les spécifications sur successeur du H264, sans regret.
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